Le Soi


Pour faire face aux sceptiques et répondre correctement à leurs interrogations, l'enseignement du Vedanta présente des arguments justifiant que le Soi réel n'est ni le ‘corps grossier’ ni le ‘corps subtil’ des êtres individualisés.

Le Soi n'est pas le corps grossier car les ‘états’ de ce corps se succèdent : les diverses apparences physiques de l'enfance s'en vont ; arrivent ensuite les diverses apparences physiques de la jeunesse puis de la vieillesse.

De même sur le plan mental : les opinions, les projets, les idéologies…, les ‘états d’esprit’, changent avec le temps. Et pourtant, le Soi demeure, le ‘Soi-Conscience’ est toujours là.

Le Principe révélateur est toujours présent même si notre corps et notre esprit changent d’aspect, de lieu ou d’état. Cela prouve que le Soi, (notre réelle identité), reste identique alors que nos divers états physiques et mentaux se manifestent et disparaissent successivement.

Toutefois, les ‘matérialistes’ croient que le corps et les facultés sensorielles et mentales constituent le soi réel. Mais, cette croyance est irréaliste. Nous faisons des expériences avec des organes corporels différents (oreilles, mains, yeux…) et des facultés sensorielles différentes (ouïe, toucher, vue…), ainsi qu'avec des facultés mentales distinctes (entendement, compréhension, imagination…). Cependant, nous constatons directement qu'un seul et même Soi se profile derrière toutes ces expériences. Par conséquent, les organes sensoriels grossiers et subtils, les diverses facultés de perception grossières et subtiles, ne peuvent être confondus avec le soi révélateur ('Soi-Conscience').

Dans le cas de l'état de rêve, différent de l'état de veille, le Soi révélateur se distingue aussi du véhicule corporel et des phénomènes mentaux qu'il révèle. Au réveil, nous constatons que la plupart de ces manifestations, révélées par notre propre conscience et vécues comme étant vraiment réelles, étaient irréalistes par rapport à celles de l’état de veille que nous prenons ordinairement pour des manifestations réalistes.

Dans l'état de sommeil profond, la prise de conscience de soi (ego) et la manifestation des divers phénomènes physiques et mentaux perçus habituellement par cette conscience, ne s’effectuent pas. Pourtant, lorsque nous nous réveillons, nous avons conscience d’avoir vécu personnellement un ‘sommeil de plomb’. Qui était donc le révélateur de cette absence de percevant et de perception ? Qui était donc le révélateur de ce profond sommeil ?

En fait, pendant le sommeil profond, la conscience, les fluctuations sensorielles et les facultés mentales individuelles sont en inertie. Ce n'est pas un état de réelle inconscience comme certains le croient. C’est tout simplement un état d’inertie rendant impossible la notion de ‘moi’ et la manifestation des sensations, émotions et autres états de la conscience individuelle (moi, ego).

Au réveil, le souvenir, résultant de la révélation de l’absence du percevant individuel et de ses perceptions, est la preuve indubitable qu’un état de Conscience, un état de Soi, - révélateur d’un état différent de l’état de veille et de l’état de rêve -, était présent lors du sommeil profond. La manifestation, au réveil, du souvenir d’un état de sommeil profond serait impossible sans la présence d’une Conscience-Témoin coexistant simultanément avec la réalisation de cet état.

Mais, cette Conscience-Témoin n’est pas perceptible au moyen de nos observations habituelles grossières ou subtiles. La Conscience-Témoin n’est pas un ‘objet’ de perception individuelle. Ce n’est pas un état individuel. C’est un état universel. Cette Conscience-Témoin existe incontestablement, sinon, je le répète, la révélation, par soi-même, d'un état différent des états de veille et de rêve, ne serait pas possible.

D’après la sagesse vedantique, ce Témoin est ‘lumineux’ (révélateur) par Lui-même. Sa ‘lumière’ (son pouvoir révélateur) est illimitée, elle ne peut s’interrompre d’aucune manière, dans aucun cas. Elle ‘éclaire’ (elle révèle) – illimitativement - quels que soient les états transitoires (veille, rêve, sommeil profond) ou non transitoires (quatrième état).

Si l'on écarte le corps 'grossier' et le 'corps subtil', il reste, en apparence, ce qui les révèle : le percevant, la conscience individualisée, l'ego. Mais celui-ci n'est pas le vrai Soi. L'ego, cette forme relative de soi-même, cet aspect matériel de la conscience, est limité. Il est conditionné par des désirs, des joies éphémères, des doutes, des souffrances… Les connaissances et expériences de cette pseudo-conscience sont partielles, incertaines, insatisfaisantes, alors que, d'après les Rishis (êtres accomplis, révélateurs du Vedanta) - dont le témoignage est basé sur une expérience réelle de paix intérieure, de plénitude, de clarté de conscience -, Brahman, le vrai Soi, l'Etre en tant qu'Etre, est "Sat-Cit-Ananda" : "Etre absolu-Conscience pure-Joie inconditionnelle".

L'expérience métaphysique du Soi - qui paraît irréaliste aux sceptiques, aux personnes trés attachées aux aspects relatifs du corps, des sens, du mental et de l'ego -, peut être vécue réellement par tout chercheur sincère. Dans le silence mental, cette 'expérience' non matérielle est vécue réellement en tant qu' Etre illimité, Conscience illimitée, Plénitude illimitée.


Image de l'éveil spirituel